FRATERNITE – ÉGALITE – LIBERTE

Savez-vous, ma chère Âme, que l’on m’a un jour demandé d’intervenir sur le sujet : L’Amour plus fort que la Mort.

J’ai d’abord refusé tout net ! Ça me gavait…

Et puis, comme toujours, j’ai fini par accepter…

Parce que je dois avoir la notion de service inscrite dans mes gènes.

Et là j’ai dit des tas d’âneries genre : on a beau être mort – on nous aime toujours autant, et vice-versa.

Ou, plus tarte encore : la vertu init ce que la mort ne saurait séparer.

Le tout étayé par la citation de Cocteau : Le vrai tombeau des morts c’est le cœur des vivants.

Façon :

Le Temps passe – Les Souvenirs restent.

Bref des sottises.

Pourquoi des sottises ?

D’abord parce que, ne vous en déplaise ma chère Âme, le temps prend tout son temps et c’est lui qui reste quand les souvenirs, eux, passent.

Ensuite parce que je n’avais rien compris à cet adage sur lequel j’ai allègrement brodé les lieux communs du souvenir.

Quelques années plus tard, je me suis demandé si je n’aurais pas dû partir des vertus dites théologales à savoir la Foi, l’Espérance et la Charité. Pour mémoire, la Foi est cette rencontre avec le divin d’où nait la confiance de même étymologie, à ne pas confondre avec la ou les croyances qui ne sont qu’habillage de cette rencontre. L’espérance se différencie de l’espoir en ce qu’elle désigne l’idée d’un après la mort. Quant à la Charité, loin des dames patronnesses, elle est à entendre dans le sens de l’agapè, cet amour inconditionnel du prochain et par là de Dieu.

Si, après la mort survient une rencontre cette fois tangible, il semble évident que la Foi intuitive du mortel devient caduque, comme devient caduque l’Espérance puisque nous voilà parvenus. Seule demeure alors la Charité, cet amour inconditionnel de Dieu, à entendre dans le double sens : de la part de Dieu et à l’égard de Dieu. C’est alors que l’on peut effectivement affirmer que l’Amour est plus fort que la Mort.

Las, ma chère Âme, il parait, depuis Nietzsche, que Dieu serait mort et que l’homme se suffirait à lui-même. En d’autres termes, qu’il n’aurait plus besoin du Souffle divin et gonflerait lui-même les voiles de son navire comme je l’évoquais dans un autre texte.

Pourquoi pas.

Mais quel serait alors la source de cet amour (plus fort que la mort) susceptible de structurer le monde et d’unir les hommes entre eux ?

Il est curieux de constater que chaque fois que l’on demande à un quidam le terme qui lui semble le plus pertinent dans la devise de la République Française, il répond invariablement : La Liberté. Et si de surcroit on lui demande ce qu’est la liberté, non moins invariablement il répond : Faire que l’on veut. Minus habens de mes deux, faire ce que l’on veut n’est pas la définition de la Liberté mais celle du Caprice.

Un prétendument philosophe en chemise a même affirmé un matin sur France Culture que d’être d’extrême droite c’est être d’abord pour la liberté, et que d’être d’extrême gauche c’est mettre en avant l’égalité au mépris souvent de la liberté. Il a même parlé des deux mots clés de la plus belle devise du monde.

Mais quid alors de la fraternité ?

Aristote dénonçait en son temps la démocratie comme une perversion de la république. Comprenons dans cette formule étonnante à première vue, que la somme des intérêts particuliers n’a jamais produit l’intérêt général. La République, la chose publique, repose sur l’abandon de son propre intérêt pour l’intérêt commun. Et cette attitude porte précisément le nom de Fraternité. En cela, le communisme, dont on peut lire les fondements dans les actes des apôtres, est à mes yeux, la plus belle idéologie qui soit. Bon, je dois reconnaître qu’une fois ce beau projet mis entre les mains des hommes, que ce soit des clercs ou des camarades, ils l’ont bien fait foirer.

Mais je suis idéaliste et reste convaincu que la Fraternité est la pierre angulaire de tout édifice social.

Et cette métaphore peut s’appliquer tout autant à l’idée d’Égalité, à savoir que chacun va pouvoir participer à la construction de cet édifice à la mesure de ses capacités et bénéficier à parts égales de sa structure.

Enfin, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, la Liberté pourra trouver à s’y épanouir dans la mesure ou égal ne signifie surtout pas identique, car rien n’interdit qu’une pierre soit plus grande ou plus petite, ou qu’elle ait une forme ou une composition différente de celle que les autres, pour peu qu’elle ne se prenne pas pour un électron libre, mais qu’avec la richesse de sa différence, elle participe totalement à l’œuvre et, pour que tienne l’édifice, elle se soude aux autres en fraternité.

Voilà pourquoi, ma chère Âme, j’aimerais que l’on inscrive sur les frontons de nos mairies :

Fraternité – Égalité – Liberté

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