Que je suis con, mais que je suis con !
Une vie foutue, une carrière réduite à néant pour n’avoir découvert qu’au crépuscule d’icelle LA réponse à LA question qui m’aurait propulsé au pinacle de la notoriété, tutoyant sans vergogne les Hippocrate, Gallien, Averroès, Pasteur et autre docteur Petiot.
Docteur avez-vous un médicament
pour rendre les enfants sages ?
Ah ma bonne dame, si je le connaissais ça se saurait, et c’est une Rollseu-Royceu en or massif que vous verriez trôner sur le parking en lieu et place de la torpédo écornée dont j’use pour me traîner au chevet des miséreux.
Et sais-tu béotien des Alpes pourquoi je n’ai pas trouvé la réponse à cette foutue question ?
Hein ?
Hoc opus – hic labor est !
(Voilà la difficulté – voilà l’épreuve)
Mal posée qu’elle était la question.
Comme toujours…
Ce n’était pas médicament le problème !
C’était sage…
Et alors là, Fiat Lux !
C’est quoi un enfant sage ?
Ne cherche pas : c’est un enfant qui N’EST PAS !
Imagine plutôt un chiard qui ne TE réveille PAS la nuit, qui ne renverse PAS son jus d’orange dans TA cuisine, qui n’écrit PAS sur TES murs…
Parce qu’enfin, qu’un gamin dorme ou ne dorme pas, on n’en a pas grand-chose à cirer, le plus gênant étant tout de même qu’il dérange toute la maisonnée.
Qu’un môme mange ou ne mange pas, qu’il soit propre ou pas, qu’il se souille avec son jus d’orange, on s’en tape ! Mais c’est qui qui va tenir la cuiller une plombe ? C’est qui qui va laver la salopette ? C’est qui qui va serpiller ?
Que le marmot soit honnête, travailleur à l’école, après tout c’est SON affaire…Mais qui va affronter la maîtresse pour s’entendre dire qu’il ne fout rien et qu’il est mal élevé ? (Ça c’est pour ta pomme !). Qui va aller le chercher au bureau des vigiles du supermarché pour s’être gavé gratis de fraises Tagada ?
Et c’est qui, pour finir, qui va l’entretenir jusqu’à point d’âge parce qu’il ne veut pas bosser rapport à cette société capitaliste pourrie qui blablabla ?
Mets-toi ça dans le crâne, quadrisomique de Mongolie : un enfant sage, c’est d’abord et surtout un enfant qui fait pas chier !
Et là hop, pas compliqué mon pote, le top du top de l’enfant qui fait pas chier c’est l’enfant mort !
C.Q.F.D.
Aussi le vrai, le pur, le miraculeux, et au passage délicieusement lucratif remède susceptible de rendre un enfant sage n’est rien d’autre que la Strychnine, voire le Polonium (plus lent mais moins détectable).
Et que je vais pouvoir avoir enfin la paix.
Et que je vais enfin te le poser là où il ne bougera plus, là où il ne se salira plus, là où il ne vomira plus, là d’où il ne te coupera plus la parole, en bref là où il cessera définitivement de te pourrir la vie.
Et, bonus, tu pourras même fièrement l’exhiber, arrangé de la plus élégante manière. Tu pourras à l’occasion le prêter à la maîtresse dont il servira de modèle à la grouillante vermine de ses condisciples, voire même le balader dans le caddie sans risquer de le voir dévaliser la première gondole venue.
Et chacun de te féliciter pour ce prodige.
Zen mon pote, Z.E.N.
Et puisqu’on en est là, connais-tu l’aponie, cette absence de troubles qui est au corps ce que l’ataraxie est à l’âme ?
Car pour le corps ça marche un peu pareil.
Leriche disait : la santé c’est le silence des organes.
Ah, ne pas sentir son ventre, ne pas percevoir son dos, être délié, à l’aise dans un corps qui sait se fait discret.
Et bien s’il y a bien quelqu’un qui n’a mal nulle part, qui est parfaitement au repos avec son corps, là encore c’est le mort.
Le mort ne souffre pas (ou plus), le mort ne vomit pas, il ne tousse pas, ne geint pas, il n’a ni chiasse, ni déprime, ni angoisse de faire un infarctus…
Bref le mort ne connaît pas son bonheur !
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ARTEM QUAEVIS ALIT TERRA
En tout lieu le métier nourrit son homme