PÈRE ÉPHRAÏM

Ne vous fiez jamais à la surface des choses…

Sur la tête du père Éphraïm, certes un champ de blé ne prenait pas racine, mais les épis y menaient une rébellion telle que seul un hebdomadaire et radical coup de tondeuse parvenait à la mater sans laisser un chaume.

En revanche, un dentier, aussi indiscipliné que ses cheveux, donnait un peu d’animation à un visage singulièrement plat, hormis une paire de globes oculaires à la saillie arrogante, surtout le gauche.

Pour le reste, qu’il soit en soutane, en col romain ou en civil, il se dégageait de son allure générale comme une impression de mal-foutu sans aller jusqu’au bancal, quelque chose de l’ordre du guingois aurait dit mon ébéniste de père.

Un si piètre ouvrage ne méritait assurément pas qu’on s’épuise à l’entretenir, et le père Éphraïm, saint avant l’heure, était comme auréolé d’un subtil fumet épicé dans lequel se mêlaient pêle-mêle une dominante sudoripare confite, un soupçon de moisi, une pointe d’oignons frits et une caudalie de l’encens que le thuriféraire s’obstinait méthodiquement à prodiguer dans sa direction.

Il en résultait que le confessionnal faisait salle comble au plus fort des rhumes mais se désertait par désenchantement aux premières chaleurs.

Mais ne vous fiez jamais à la surface des choses, vous ai-je dit : le père Éphraïm était un saint homme et les paroissiens ne s’y trompaient pas qui tous reconnaissaient la justesse de sa parole – pour peu qu’elle fût proférée à distance.

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NON BENE OLET QUI SEMPER BENE OLET

Il ne sent pas bon, celui qui sent toujours bon

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