Je repense souvent à cette définition que Coluche donne des technocrates : C’est les mecs que, quand tu leur poses une question, une fois qu’ils ont fini de répondre, tu comprends plus la question que t’as posée.
Eh bien, faute d’avoir affaire avec un technocrate, j’ai connu la même perplexité à l’écoute des réponses des plus amphigouriques qu’ont pu m’asséner des clercs lorsque je les interrogeais à propos de la Trinité.
En gros, ils sont trois mais ça ne fait qu’un tout en faisant tout de même trois qui se réduisent à un.
Autant dire que un plus un égale trois…
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Fort heureusement, j’ai un ami prêtre qui a été beaucoup plus clair en partant du signe de croix :
– le Père en haut
– Le fils rejoint en bas par une verticale.
– et le Saint-Esprit, horizontal.
Le père s’engendre dans le Fils, le Verbe devient chair, de façon transcendante, et le Fils après son ascension nous laisse le souffle, de façon quasi immanente, Esprit Saint, dit Paraclet, pour nous venir en aide
Autrement dit-il, y a pour lui trois personnes en une seule : le Père, le Fils et le Saint-Esprit, qui sont plus que de simples hypostases. Trois personnes qui se manifestent de façon différente tout en ayant la même source et, en cela, ne faisant qu’une.
En fait, je me rends compte que dans sa lecture des évangiles, il prend le texte comme une certaine forme de révélation, même s’il ne va pas jusqu’à dire que ces paroles d’évangile soient paroles d’évangile suivant la plaisanterie classique. Néanmoins, il croit, et c’est tout à son honneur en tant que prêtre, qu’au départ il y a réellement Dieu le Père qui s’incarne en Jésus tel que le relatent les évangélistes et que ce dernier nous laisse l’Esprit Saint.
Voilà ce que j’ai retenu de sa conception de la Trinité.
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J’ai pour ma part un regard très différent.
Au final je ne crois pas à cette Trinité-là, simplement parce que pour moi les évangiles sont avant tout un texte dans lequel, tout au long de leur récit, les évangélistes nous parlent avant tout de l’idée que je me fais de la Trinité. Je vais m’en expliquer.
Si nous considérons la Trinité dans son aspect de réel, ce que les linguistes appellent le référent, nous allons nous la représenter selon deux modes opératifs : le langage et l’image, autrement dit puisque c’est mon dada, le symbolique et l’imaginaire.
J’ai longtemps tergiversé pour savoir qui du Père, du Fils ou du Saint-Esprit était le réel. J’ai longtemps attribué ce qualificatif au Père avant de revenir sur mon idée. Si quelque chose agit dans nos vies, de façon concrète, c’est bien ce souffle qui nous est donné et qui pousse les voiles de notre navire pour lui permettre le parcours de nos vies.
Dieu le Père relève alors du langage, du signifiant, Hashem le Nom, le nom de Dieu, voire YHVH le signifiant imprononçable ou ses substituts (El, Elohim, Adonaï, Ehyeh Asher Ehyeh, Shaddaï ou Tzevaot).
Mais ce dieu, nul ne l’a vu. Tout au plus est-il dit dans l’Ancien testament qu’ils ont vu sa parole.
Jésus, va venir remplir cette lacune de la fonction imaginaire. Ainsi, dans les évangiles, tous ont pu le voir et même le toucher, et cela a permis une fabuleuse iconographique dans les siècles qui ont suivi.
À partir de là, la Trinité n’est plus la réunion de trois personnes en une, mais la réponse à la nécessité de toutes nos représentations, qu’elles soient profanes ou dans cette occurrence divines.
La Trinité n’est au final que la fusion logique du Nom de Dieu, de l’Image de Dieu et du Réel de Dieu agissant.